Cet article est une réflexion sur ce que l'on appelle la "bête" dans vampire la mascarade. Nous nous appuyons sur deux de nos articles précédents qu'il est préférable d'avoir lu si vous souhaitez comprendre ce qui suit : Changelin et le paradoxe vampirique et Dieu dans le monde des ténèbres.
Chez les vampires, on considère que l'esprit est constitué de deux facettes distinctes. La première, l'humanité, correspond à ce qu'était psychologiquement l'humain avant l'étreinte vampirique. Cette notion recouvre en particulier la raison, la pensée froide et rationnelle et surtout la morale. La seconde facette est la bête. Celle-ci serait ajoutée à l'esprit humain lors de l'étreinte. Il s'agit d'une sorte de réservoir pulsionnel, une sous-personnalité incontrôlable. En termes de jeux, la bête s'exprime par le biais de la frénésie. Lorsque le vampire est assoiffé, il est soumis au risque de perdre les pédales et de laisser le contrôle à la bête qui va tout simplement attaquer l'individu le plus proche pour se nourrir. Notons d'emblée que dans le contexte lexical religieux de vampire, le terme "bête" a une connotation "mauvaise" car la bête renvoie aux pulsions et ces dernières ne sont pas vraiment valorisées par la chrétienté. Par ailleurs, la bête est un des noms du diable, ce qui n'est pas innocent non plus. Mais tout cela ne nous dit pas ce qu'est concrètement la bête. S'agit-il d'un parasite qui se transmet par étreinte ? Est-ce juste un nom que l'on appose à des coups de colères des vampires mais sans existence réelle ? La bête est-elle une conscience indépendante de l'humanité de l'individu et cohabitant avec elle ? Nous allons tenter ici d'apporter des réponses à ces différentes questions.
Je crois que pour comprendre ce qu'est la bête, il faut revenir aux changelins puisque les vampires appartiennent initialement à cette race. Si les vampires reposent sur un dualité bête/humanité, les changelins sont quant à eux condamnés à maintenir un semblant d'équilibre entre leur niveau de glamour et leur niveau de banalité. Cet équilibre entre l'humain et l'être féerique est ce qui définit le changelin. Dans le cas des vampires, nous savons que c'est la banalité qui a pris le dessus. Pourtant, les deux composantes du changelin sont encore présente chez les vampires bien que la composante féerique soit fortement altérée par la domination de la composante humaine. On trouve donc l'humanité représentée par un score sur dix points et représentant la part humaine du vampire, sa banalité. En opposition avec l'humanité, on trouve ce que les vampires appellent la bête et qui est selon moi un résidu de leur part féerique passée.
Cette correspondance entre la bête et la féerie est appuyée par de nombreux éléments. On trouve par exemple à la fois chez les vampires et les changelins un idéal d'équilibre parfait entre les dualités. On appelle Siochains les kithains qui sont parvenus à trouver l'équilibre entre l'humanité et la féerie. Du côté des caïnites, on trouve le même genre de phénomène mais appelé Golconde. Enfin, on trouve même cette notion d'état d'équilibre spirituel du côté des cathéens (les vampires d'orients) avec le yin et les yang, ce qui représente symboliquement l'ensemble des oppositions classiques (bien et mal, masculinité et féminité etc). L'opposition humanité/féerie est aussi une opposition réflexion/émotion ou encore pragmatisme/spontanéité. La part féerique des changelins est totalement dominée par les émotions et les pulsions au même titre que la bête.
On remarque en revanche que la bête est toujours animée de pulsions meurtrières, mélange de faim et de furie alors que les intenses pulsions et émotions des fées sont de tout types et peuvent se situer aussi bien sur le terrain de l'amour que de la haine. Cette variabilité changeline ne se retrouve donc pas chez les vampires. La raison en est évidente, les vampires descendent tous d'un bonnet rouge buveur de sang et la bête est la part féerique "momifiée" par la banalité de ces bonnet rouges prodigues. La bête, c'est un peu de l'esprit du premier vampire qui se glisse dans chacun. Ça n'est pas l'humain subissant l'étreinte qui a soif de sang, c'est le bonnet rouge qui en réclame toujours. Lorsqu'il n'est pas assez nourri par l'humain, il prend le contrôle et on découvre alors sa nature : il s'agit d'un fou furieux incontrôlable, attaquant n'importe qui et totalement guidé par sa faim. Le bonnet rouge typique en quelque sorte... Ainsi selon moi, dans la frénésie, c'est Caïn qui s'exprime, celui-ci étant une sorte de boule de rage gloutonne. Pour l'humain ayant subit l'étreinte, la seule solution pour garder le contrôle et ne pas le laisser à ce dangereux symbiote est de le nourrir pour le calmer. Il doit donc consommer du sang régulièrement et cela fonctionne bien.
Pour conclure, les vampires sont avant tout des bonnets rouges prodigues. Ce sont donc des bonnets rouges dont la part humaine a vaincu la part féerique. Cette part féerique avec ses sales manies de glouton sanguinaire est donc dominée, prisonnière de l'humain et tente de prendre le contrôle quand elle a trop faim ce qui se caractérise par la frénésie. La bête existe bien, elle n'est pas qu'une métaphore, elle n'est pas non plus un simple parasite, il s'agit d'un être fée vivant sous la domination écrasante d'humains ayant subit l'étreinte vampirique.
Sylvain
1 commentaires:
La Golconde ne serait elle plutôt pas similaire à ce qu'il arrive à un changelin en surcharge de banalité? Un changelin totalement immergé dans la banalité du monde deviens un simple humain. De même, pour atteindre la Golconde, un vampire doit faire grimper son humanité.
Un vampire ayant atteint la Golconde et étant donc "guéri" de son vampirisme serait en fait simplement un changelin ayant perdu tout lien avec la féérie. Ce que les changelins fuient à tout prix, certains vampires le recherche. C'est simplement plus difficile pour eux car leur version du Glamour est plus "récente" et beaucoup plus liée au monde moderne.
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