La taverne des rôlistes

Réflexion et analyse critique sur le JdR en général et sur des JdR particuliers

.

Existe-t-il des "bonnes pratiques" du JDR ?

On trouve souvent sur le net un certain nombre de recettes supposées nous permettre à nous, rôlistes, de "mieux jouer". Par exemple, ces recettes prétendent permettre aux mj de mieux immerger leurs joueurs ou aux joueurs de mieux interpréter leurs personnages. Lorsqu'on tend l'oreille, on peut entendre des protestations. On entend que chaque groupe de joueur est unique et joue d'une manière différente, et qu'en conséquence, aucune recette ne peut être pertinente. Que pouvons-nous déduire de ces informations contradictoires ?

Personnellement, lorsque j'ai commencé le JDR en tant que MJ, j'avais peur de ne pas être à la hauteur. Je me suis donc penché sur les sites internet qui proposaient des moyens de devenir un "bon MJ". Par exemple, je me suis efforcé de mettre de la musique, rigoureusement choisie, en fonction de l'ambiance que je souhaitais poser. Au bout de quelques parties (disons une dizaine), j'ai fini par laisser tomber cette pratique car elle n'apportait pas grand-chose à l'ambiance et était source de contraintes (le temps perdu à changer de musique, le fait de devoir penser à ce détail me rendait moins disponible pour le reste...). En somme, soit cette recette est mauvaise (pour tous les rôlistes), soit elle ne correspondait simplement pas aux spécificités de mon groupe de joueurs de l'époque.

Le débat concernant la pertinence de règles générales me semble généralement très mal posé. Il consiste à se demander si tous les rôlistes jouent de la même manière ou si au contraire ils jouent tous différemment. En rhétorique, on appelle cela un faux dilemme, c'est-à-dire qu'on suggère qu'il n'existe que ces deux possibilités de réponses alors qu'il y en a d'autres. Pour ma part, je poserais plutôt le problème de cette manière :
- Existe-t-il une variabilité dans les pratiques du JDR ?
- Existe-t-il des constantes dans les pratiques du JDR ?
- Existe-t-il des pratiques dominantes dans le JDR ?


Existe-t-il une variabilité dans les pratiques du JDR ?

Incontestablement, oui.
Tout le monde ne joue pas de la même manière. Il suffit d'ailleurs d'avoir parcouru deux ou trois tables de jeux pour s'en apercevoir. On ne peut donc pas tous généraliser sans prendre un minimum de pincettes.


Existe-t-il des constantes dans les pratiques du JDR ?

Oui.
Le JDR est un type spécifique de jeu. Par exemple, le JDR est différent du monopoly. Si vous faites un JDR, vous ne faites pas un monopoly (ou alors vous faites deux tâches différentes en même temps). Il y a donc bien certains points communs entre les pratiques des rôlistes tout simplement parce qu'ils font tous du JDR. Cela implique par exemple qu'ils incarnent un (ou plusieurs) personnage, qu'ils jouent à plusieurs (nous parlons du JDR sur table), etc. De cette constatation découle l'idée qu'il est théoriquement possible d'envisager des recettes très spécifiques qui soient valables dans tous les groupes de joueurs. Évidement, ces recettes seront bien plus restreintes que ce que l'on trouve habituellement sur le sujet.


Existe-t-il des pratiques dominantes dans le JDR ?

C'est très probable.

Par exemple, peut être que tous les groupes de rôlistes ne jouent pas avec un MJ, mais je pense qu'une très large majorité d'entre eux en ont un pendant leurs parties. C'est une pratique normalisée (sans doute parce que c'est la plus propice au plaisir de jeu). Le même commentaire peut être fait sur l'utilisation de caractéristiques sur une feuille de personnage, de dés ; malgré le fait que certains JDR ou rôlistes s'en passent, il est clair que l'utilisation de ces objets est majoritaire. Ce ne sont pas des éléments obligatoires, personne ne dit qu'il "faut" les utiliser, mais dans la pratique, il semble que la plupart des rôlistes fonctionnent avec. Lorsque l'on tombe sur une recette concernant l'utilisation des dés, il y a donc une certaine malhonnêteté intellectuelle à dire "ben non, il y a des JDR sans dés, donc ce texte, c'est n'importe quoi".

Affirmer qu'aucune recette n'est généralisable ne revient pas seulement à dire que les rôlistes ne jouent pas tous pareil, mais cela revient aussi à dire qu'il n'y a rien en commun entre les différentes tables de JDR, ce qui est absurde. Le JDR est un jeu particulier dans le sens où il n'y a pas de gagnant ni de perdant, pas de moyen clair de mesurer la performance (c'est à ma connaissance le seul jeu dans lequel on n'a ni score ni gagnant). De ce fait, le seul but du JDR est le plaisir des joueurs. J'ai déjà exposé le fait que la seule constante "objective" permettant d'évaluer la qualité d'un rôliste est son empathie (bien que l'empathie soit justement une caractéristique difficilement mesurable). Malgré cela, il n'est pas impossible que certaines règles de conduite de la part du MJ (par exemple) fonctionnent plus ou moins à tous les coups en termes de plaisir de jeu. Ce qui fait qu'un groupe prend du plaisir dépend bien entendu de ses goûts, de la même manière que tout le monde ne s'entend pas toujours sur ce qui est beau ou non. Pourtant, dans cette variabilité, il existe bien des objets, ou des gens, qui sont d'une manière générale considérés comme plus beaux que d'autres. Et il existe peut-être des détails dans la manière de jouer qui, dans la plupart des groupes, rendront les parties plus agréables.

Pour conclure, il est clair que des "bonnes pratiques" existent théoriquement, mais que nous n'avons pas forcément réussi à mettre la main dessus. Elles portent sur des points bien spécifiques qui regroupent tous les rôlistes dans leur manière de jouer. Quant à savoir si les "bonnes pratiques" qui sont proposées sur le net sont pertinentes, c'est un autre débat...

3 commentaires:

sympathique article! les ennuyeuses définitions de début de bouquin de jeu semblent répondre à ces interrogations, les concepteurs fournissent les outils pour canaliser l'imagination des joueurs et de leurs humbles et dévoués meneurs de jeu, après, chaque groupe adapte la tambouille à sa sauce pour un maximum de plaisir. Tu parles du plaisir des joueurs qui prime, il est vrai que pour le maître du jeu, le plaisir est déjà dans l'implication au sein de l'univers, l'apport personnel puis ensuite l'accomplissement de l'aventure. C'est un paradoxe du jeu de rôles, ce qui lui donne sa force; les points communs entre tous les jeux sont des ensembles de limitations, de contraintes, qui offrent des évasions sans limite à l'esprit.

 

Nouveau design du site ici je me trompe ?

Ce qui rend le sujet des "bonnes pratiques" difficiles, c'est que comme tu le dis ce n'est pas le Monopoly. Autant le Monopoly tout le monde joue à peu près de la même manière, autant en jeu de rôle, avec des règles similaires, on aura des jeux très différents (même sur deux groupes qui pratiquent le même jeu !)

La vraie bonne manière, c'est de trouver ce qui convient au groupe, au meneur, en fonction des personnalités et envie de chacun. Et pour trouver ce qui convient, ça veut dire qu'il faut d'abord chercher et expérimenter !!! Et c'est là où à mon avis, les conseils qu'on peut trouver sur internet, dans des livres ou dans des magazines, son utiles, car ils donnent justement des pistes pour expérimenter. Ensuite à chacun de tester ces conseils et de voir ce qui fonctionne ou pas...

 

Footbridge :
Je pense aussi que c'est le joueur/MJ qui fait lui même le tri dans les conseils. Dans l'article, j'ai donné l'exemple de la musique pendant les JDR (pratique que j'ai laissé tomber), mais il y a aussi d'autres conseils que j'ai appliqué, et conservé (notamment des "trucs" pour donner de l'épaisseur aux PNJ).

 
Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...