(Dans cet article, nous nous plaçons dans une optique simulationniste et le contenu de cet article n'a de sens que dans cet optique. Nous considérons donc qu’un jeu de rôle doit rendre compte de manière réaliste de l’univers fictif dans lequel il se déroule. Pour une présentation du simulationnisme, voir par exemple « Clarification du simulationnisme dans le modèle à trois volets » par John Kim)
Parmi la gamme de comportements traditionnellement attribués au MJ, on trouve le « calcul » (avec ou sans dés) et la description des conséquences des actions des PJ. Si le pouvoir des joueurs sur le monde fictif n’est, en gros, pas très différent du pouvoir de leur personnage (nous discuterons de ce point précis dans un prochain article), l’influence du MJ sur le monde fictif s’apparente à celle d’une sorte de divinité du destin décidant carrément de la manière dont le monde va se comporter. Pourtant, le MJ n’est qu’un simple mortel avec certes quelques modestes qualités mais aussi avec ses failles. En tant qu’humain, il peut être très imprécis voir complètement largué sur des tâches simples, alors on peut s’attendre à ce que son rôle divin réclamant une sorte d’omniscience puisse ne pas être assumé avec perfection. Si le MJ doit décider en quelques secondes de ce qui reste de la carcasse d’un avion après un crash, il va très certainement en faire une estimation d’une grossièreté affligeante car cela dépend d’un nombre de paramètres colossal et qu’il ne maîtrise sans doute pas (la nature du sol, la forme de l’avion, les matériaux qui le composent, l’angle d’impact etc). Ce MJ simulationniste idéal est aussi supposé être en mesure de décider en temps réel des comportements d’individus spécifiques (les PNJ) de manière cohérente alors que la psychologie humaine est quelque chose de trop complexe pour que cela soit imaginable (on peut penser que c’est aussi valable pour la psychologie elfique, vampirique, démoniaque ou encore trollesque).
De son côté, la réalité ne se trompe jamais. Elle ne fait pas d’erreur de calcul pour décider de la vitesse de chute d’un corps ou de la variation de pression en fonction de l’altitude. Lorsqu’on agit dans la réalité, celle-ci réagit parfois de façon surprenante, mais toujours en adéquation avec elle-même. Les restes de la carcasse d’un vrai avion crashé sont ce qu’ils devraient être compte tenu des conditions. Il y a donc bien un décalage entre la manière dont le MJ fait tourner son univers fictif et la manière dont celui-ci « devrait » tourner (je rappelle que ce « devrait » est simulationniste). Le pilotage du monde fictif qu’effectue le MJ est basé sur la représentation qu’il en a. Cette représentation étant forcément imparfaite et incomplète, le pilotage qui en résulte est plus ou moins irréaliste. Généralement, cet obligatoire et quasi-perpétuel échec simulationniste ne semble pas poser de problème particulier autour des tables. J’y vois quatre raisons principales.
Parmi la gamme de comportements traditionnellement attribués au MJ, on trouve le « calcul » (avec ou sans dés) et la description des conséquences des actions des PJ. Si le pouvoir des joueurs sur le monde fictif n’est, en gros, pas très différent du pouvoir de leur personnage (nous discuterons de ce point précis dans un prochain article), l’influence du MJ sur le monde fictif s’apparente à celle d’une sorte de divinité du destin décidant carrément de la manière dont le monde va se comporter. Pourtant, le MJ n’est qu’un simple mortel avec certes quelques modestes qualités mais aussi avec ses failles. En tant qu’humain, il peut être très imprécis voir complètement largué sur des tâches simples, alors on peut s’attendre à ce que son rôle divin réclamant une sorte d’omniscience puisse ne pas être assumé avec perfection. Si le MJ doit décider en quelques secondes de ce qui reste de la carcasse d’un avion après un crash, il va très certainement en faire une estimation d’une grossièreté affligeante car cela dépend d’un nombre de paramètres colossal et qu’il ne maîtrise sans doute pas (la nature du sol, la forme de l’avion, les matériaux qui le composent, l’angle d’impact etc). Ce MJ simulationniste idéal est aussi supposé être en mesure de décider en temps réel des comportements d’individus spécifiques (les PNJ) de manière cohérente alors que la psychologie humaine est quelque chose de trop complexe pour que cela soit imaginable (on peut penser que c’est aussi valable pour la psychologie elfique, vampirique, démoniaque ou encore trollesque).
De son côté, la réalité ne se trompe jamais. Elle ne fait pas d’erreur de calcul pour décider de la vitesse de chute d’un corps ou de la variation de pression en fonction de l’altitude. Lorsqu’on agit dans la réalité, celle-ci réagit parfois de façon surprenante, mais toujours en adéquation avec elle-même. Les restes de la carcasse d’un vrai avion crashé sont ce qu’ils devraient être compte tenu des conditions. Il y a donc bien un décalage entre la manière dont le MJ fait tourner son univers fictif et la manière dont celui-ci « devrait » tourner (je rappelle que ce « devrait » est simulationniste). Le pilotage du monde fictif qu’effectue le MJ est basé sur la représentation qu’il en a. Cette représentation étant forcément imparfaite et incomplète, le pilotage qui en résulte est plus ou moins irréaliste. Généralement, cet obligatoire et quasi-perpétuel échec simulationniste ne semble pas poser de problème particulier autour des tables. J’y vois quatre raisons principales.
Premièrement, tout le monde n’est pas particulièrement de sensibilité simulationniste. Or, un ludiste ou un narrativiste accorde normalement assez peu d’importance à ce genre de considération.
Deuxièmement, il est possible qu’un certain nombre de tables ait suffisamment intériorisé l’idée selon laquelle le MJ aurait toujours raison (pour une critique de ce dogme faisant parti de la culture rôliste, voir « Le MJ a-t-il toujours raison ? ») pour prendre en compte ses descriptions sans s’étonner d’éventuelles incohérences. Même un simulationiste est capable de mettre un peu d’eau dans son vin pour ne pas aller jusqu’à un niveau de chipotage qui bloquerait le jeu.
Troisièmement, dans une partie de JdR on ne va jamais jusqu’au bout des détails descriptifs. Bien sûr que je suis incapable de dire sur combien de mètres la carcasse de l’avion a trainé au sol, mais on ne me posera pas forcément la question non plus. Lorsqu’on décrit la chute d’un objet dans un JdR, on n’a pas besoin de donner la vitesse de la chute ou le nombre de décibel caractérisant le bruit qu’il fera en tombant. On va souvent être plus flou comme « le X tombe de la table, il s’écrase au sol en faisant un bruit sourd ».
Quatrièmement, nous jouons probablement le plus souvent avec des gens qui ont une représentation du monde assez proche de la nôtre. Le MJ n’est pas le seul autour de la table à être limité dans ses connaissances. Sur la base de connaissances ou représentations communes peuvent se construire pas mal de choses qui sembleront cohérentes. Par exemple, un MJ qui met des chercheurs de toutes disciplines en blouse blanche (alors que cela ne concerne en réalité que certaines disciplines) ou qui fait exploser une voiture dans un feu d’artifice de flammes gigantesques après un accident (comme dans les films américains) fonctionne de manière cohérente aux yeux des joueurs qui pourraient trouver cela réaliste.
Comme nous l’avons vu, il n’y a pas dans la pratique de gros problème lié à la cohérence dans les parties. Toutefois, il est intéressant de prendre de conscience du fait que cette absence de problème de cohérence ne provient pas d’une véritable cohérence mais de plusieurs petits arrangements et concessions que nous faisons et que nous avons brièvement décrit ici. Enfin, précisons que cette incohérence étant inhérente à la complexité des univers fictifs, elle pourrait ne pas être présente dans des univers intrinsèquement simples. En effet, il est possible d'imaginer qu'un univers fictif ne fonctionne que sur des mécanismes simples et entièrement maîtrisables (cela pourrait être le cas d'univers fictifs entièrement basés sur la magie, la logique narrative (Les chroniques du Disquemonde) ou encore une caricature volontairement grossière d'un autre univers (Donjon de Naheulbeuk).
Sylvain
1 commentaires:
yep! yep!
sujet interessant qui met le doigt sur les limites du MJ, mais aussi sur celles des joueurs et en définitive sur celles du jdr en temps que pratique visant entre autre à simuler une certaine forme de "réalité".
J'aime beaucoup les implications implicites qui en découlent, à savoir qu'en somme en jdr il s'agit surtout de faire consensus entre les imaginaires et représentations de chacun... avec en cas de doute, désaccord, incompréhension, que la confiance qu'accordent les joueurs au MJ permette de résoudre, dépasser, relativiser la situation non réalistes posant problème. Ceci est loin d'être toujours évident et pourtant je ne vois pas de meilleur moyen de pallier aux innévitables failles, erreurs, approximations qu'entraine la description jdr d'un univers forcemment imparfaitement simulé. Après on peut toujours ajouter des règles"exhaustives", multiplier les supports narratifs (photos, plans...,) ou prendre toujours plus de temps en donnant un luxe de détails descriptifs, l'art rolistique est et restera une tentative simulationniste très approximative... et en un sens cela n'en est que mieux pour ses dimensions ludiques et narratives...
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