La taverne des rôlistes

Réflexion et analyse critique sur le JdR en général et sur des JdR particuliers

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Caractérisation du JDR

L'exercice qui consiste à définir ce qu'est le JDR sur table est souvent périlleux. Nous nous y sommes risqués, mais bien d'autres l'on fait comme la JDRTV, la FFJDR, Alias ou encore Scriiipt. Ces définitions sont relativement convergentes et passent généralement par un parallèle avec d'autres types de jeux comme les wargames, ou d'autres activités comme le théâtre ou le conte. Or, on sait que la frontière entre différents types de jeux n'est pas toujours étanche. Ainsi, la différence entre un jeu de carte et un jeu de plateau semble bien claire si nous comparons la belote avec Warhammer Battle, par contre, si l'on s'intéresse aux jeux qui mêlent plus ou moins les deux types d'accessoire, on s'aperçoit alors qu'il n'existe pas une frontière bien précise mais plutôt une zone de flou qui relie les deux catégories. Certains JDR intègrent des accessoires comme des cartes, plateaux et autres figurines. Si cette tendance en venait à s'accentuer, à partir de quel degré d'accessoirisassion les JDR deviendraient ils autre chose que du JDR ? Le JDR est-il séparé des autres jeux par une frontière claire ? Pour répondre à ces questions, j'ai déterminé des critères très simples mais néanmoins efficaces permettant de caractériser les différents types de jeux de société. L'ambition de cette démarche est de concevoir une caractérisation la plus utilisable (et donc la plus simple) possible tout en étant pertinente.

Liberté et contrainte

Dans l'enquête que nous avons réalisé sur ce blog, nous demandions aux participants quel était le principal point fort du JDR sur table par rapport aux MMORPG. Alors que la question était ouverte (modalité de réponse libre) une bonne majorité (25 sur 36 réponses pour cette question) des participants a fourni une réponse évoquant "la liberté d'action". En effet, la palette d'actions possibles dans les MMORPG est souvent plus importante que dans les autres jeux vidéos (il est parfois possible de danser, de faire différents gestes ou de prendre des postures spécifiques) mais bien moins importante que dans les JDR sur table. Précisons tout de même que ce que nous "mesurons" ici n'est pas le nombre brut d'actions possible, mais le nombre d'actions possibles au regard des capacités du personnage. Qu'un personnage non magicien ne puisse lancer de sort ne constitue pas une limitation de la liberté d'action à la manière dont nous l'envisageons. Ce critère se base donc sur "ce que le personnage est raisonnablement capable de faire". A partir de ce critère, on constate dans certains jeux une absence de limitation (les JDR classiques), dans d'autres, les personnages sont partiellement ou totalement limités par les règles (jeu de plateau) ou par les contraintes techniques (MMORPG). Nous avons donc affaire à un continuum reliant deux extrêmes que nous appellerons "contrainte" et "liberté". Ce critère peut être défini comme ceci : "Quelle proportion d'actions que le(s) personnage(s) serai(en)t raisonnablement capable(s) de réaliser peu(ven)t il(s) réaliser dans le jeu ?"

Liberté et contraintes pour définir le jeu de rôle

Dans l'exemple ci-contre, nous avons positionné différents jeux sur le continuum. Le monopoly permet de jouer un promoteur immobilier, mais les actions sont extrêmement limitées puisque la seule marge de manœuvre du joueur consiste à décider s'il souhaite ou non acheter le terrain sur lequel il se trouve, et s'il souhaite y construire des maisons. En progressant dans le sens de l'axe, on rencontre Warhammer Battle. Ce célèbre jeu de plateau permet de faire effectuer un certain nombre d'actions aux personnages, plus que dans le monopoly, mais nous sommes encore très loin du jeu de rôle. Ensuite, nous tombons sur World of Warcraft. Ce MMORPG permet indubitablement plus d'actions que Warhammer Battle, il est cependant limité par les contraintes techniques, ce qui empêche un certain nombre de possibilités. Enfin, tout au bout de l'axe, on trouve le JDR classique. Celui-ci permet généralement de faire tout ce que les personnages sont supposés être capables de faire. 

Simulation

Pour illustrer le second critère, prenons l'exemple du jeu de carte "magic l'assemblée". Dans ce jeu de cartes, vous incarnez un magicien qui affronte un autre magicien dans le cadre d'un duel. Les différents éléments et règles du jeu simulent plus ou moins cette situation imaginaire. Pourtant, en regardant certaines cartes, on peut se demander ce qu'elles cherchent à simuler. Prenons par exemple la carte intitulée "Limule", il s'agit d'une créature bleu qui a pour spécificité d'infliger un point de dégât à une créature ou à un joueur au choix lorsqu'elle est engagée. Autrement dit, elle est capable d'infliger des dégâts "à distance". Vous voyez ce que c'est, une limule ? C'est un animal caparaçonné vivant dans les fonds marins, et d'ailleurs bien illustré sur la carte magic en question. Comment se fait-il qu'une limule soit capable d'infliger des dégâts de cette manière ?

Cet exemple illustre l'idée selon laquelle un jeu peut contenir un certain nombre de règles qui n'ont pas pour fonction de simuler les évènement mais simplement d'apporter un aspect plus ludique, ou stratégique, ou encore pour rendre le jeu plus jouable. En fait, les pseudo-incohérences de ce types dans Magic ou dans d'autres jeux du même type ne posent aucun problème puisque les joueurs sont plus dans un état d'esprit de réflexion stratégique que d'immersion. Dans un JDR, ce genre de chose serait difficilement acceptable. Toute règle qui ne se justifie pas par rapport au monde imaginaire éloigne le jeu en question de la catégorie "jeu de rôle". Comme pour le critère précédent, nous définissons un continuum dont les extrêmes se nommerons "non adéquation règles/monde" et "adéquation règles/monde". Ce critère peut être défini ainsi : "Quelle proportion des éléments et des règles du jeu est en adéquation avec le monde simulé ?"

Voici quelques exemples de jeux positionnés sur cet axe. Tout à gauche, on trouve les échec qui ont une très faible adéquation règles/monde. Ce jeu simule une bataille entre deux royaume, mais tout y est très schématique. Par exemple, la reine est sur le champ de bataille et elle est la plus forte ! Les fous sont là aussi et ils se déplacent en diagonale... Avec une adéquation plus importante, nous citons l'exemple du monopoly. En effet, plusieurs règles servent réellement à simuler l'action (achat avec de l'argent, les cartes "chance" simulent les aléas liés à l'argent...) et d'autre non, comme le fait de se déplacer de terrains en terrains sur la base de jets de dés. En somme, je jette les dés, j'atteri sur un terrain et si celui-ci n'est pas à moi, je dois payer alors que parfois, le terrain juste à côté m'appartient ! Il serait pourtant plus simple que je m'arrête sur mon propre terrain... Avec Warhammer Battle et World of Warcraft, on s'approche vraiment du bout "adéquation" de l'axe. Ces deux jeux sont largement dominés par des règles qui servent réellement à simuler le monde, malgré cela, il reste des points de détails qui sont là pour d'autres raisons. Du côté de Warhammer, je pense aux règles de fuite. Lorsqu'une de vos unités fuit, elle a au tour suivant des chances de se rallier, par contre, si l'unité "tombe de la table", elle est perdue à tous jamais. Tomber de la table ? Ce critère est, du point de vue du monde, totalement arbitraire puisque les batailles dans le monde de Warhammer ne se passent pas sur une table géante. La table que vous utilisez pour jouer peut-être immense ou plutôt petite, cette règle est donc plutôt liée à la jouabilité qu'à la simulation. Du côté de World of Warcraft, on pourrait parler de l'existence de centaines de guildes multiraciales alors que par exemple, les mort-vivants ne sont pas des entités très portés sur la camaraderie avec les autres peuples. Là encore, cette possibilité de mélanger les races sans contraintes provient sans aucun doute d'une volonté de rendre le jeu plus jouable en faisant deux camps distincts, le bien et le mal, mais cela au détriment du réalisme.

Modèle

En croisant nos deux continuum, nous obtenons un modèle en deux axes sur lesquels nous pouvons positionner différents jeux.

Définition du JDR modélisé en deux axes
Dans notre exemple ci-contre, World of Warcraft est le jeu qui se situe le plus près de la catégorie "JDR". On voit aussi que Warhammer Battle est éloigné de cette catégorie, principalement à cause du manque de liberté. Enfin, le monopoly est encore plus éloigné de la catégorie JDR car en plus du manque de liberté, il se caractérise par une non adéquation règles/monde importante.





Cette modélisation est sans doute incomplète et ne demande qu'à être améliorée, voir même falsifiée. C'est pourquoi vous êtes invités, chers lecteurs, à nous soumettre vos commentaires et vos critiques.

Sylvain

1 commentaires:

"vous êtes invités, chers lecteurs, à nous soumettre vos commentaires et vos critiques"
- Présent !

Un élément qui me saute aux yeux est la possibilité d'appropriation et de modification du jeu.
D'un côté WOW est figé par ses lignes de codes non modifiables (celui qui prétends le contraire verra son compte banni), c'est le cas aussi du jeu de chibre, dont la modification des règles séculaires causerait un génocide de joueurs, de l'autre côté du ring WJBF invite à mettre des règles additionnelles (combat sur fleuve glacé, embuscades) et une fois encore, le JDR se pose comme le stade ultime de la customisation, existe-t'il un meujeu qui n'a pas créé ses propres règles ?
MJ

 
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